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17 décembre 2008

Guinée : black-out sur les tueries de 2007

«Quelle commission pourrait arrêter ceux qu’on soupçonne ou seulement enquêter au sein de toute la haute hiérarchie militaire, policière et de l’ensemble des « corps habillés », collectivement responsables des massacres en question ? Seul un État refondé, une nation recomposée peuvent interpeller ces hauts personnages, qui se trouvent être de hauts gradés. Et vous croyez que c’est le gouvernement actuel qui pourrait le faire ? Seuls des organes souverains issus d’un débat national, peuvent amener à la barre les quidams en question, cela, sous la veille étroite et massive du peuple debout comme lors des évènements de janvier-février»¹.

Près d'un an et demi après l'instauration par le Parlement d'une commission d’enquête sur la répression étatique des manifestations de l'année 2007, l'on pourrait se demander pourquoi cette commission n’a pu travailler correctement. La citation de l'écrivain Saidou Nour Bokoum en exergue donne à cette interrogation une réponse lucide : il ne faut pas rêver.
L'impunité se perpétue en raison principalement de l’absence de volonté politique réelle au plus haut sommet de l’État. Même si le gouvernement (L. Kouyaté) issu des manifestations de janvier et février 2007 a fait des promesses pour faire toute la lumière sur les cas de meurtres, les passages à tabac et autres abus délibérément perpétrés afin que les auteurs et commanditaires soient traduits en justice, force est de constater que rien n’a pu être réalisé de façon concrète. Mise en place pour une durée d'un an, cette commission des rebuts va bientôt disparaître pour laisser place à l'impunité galopante dans le pays.
L'intervention récente dans les médias étrangers de Dr Ahmed Tidiane Souaré, l'actuel Premier ministre, à propos de ladite commission a soulevé toute ambigüité quant au manque de volonté de son gouvernement pour sa mise en marche : « Je l'ai trouvée [la commission] en place. Elle n'avait pas de moyens et quand je suis arrivé, ça ne pouvait pas être ma priorité de la mettre en marche dans la mesure où il y a eu une grosse mutinerie que je me suis attelé à maîtriser. […] Le contexte était particulièrement flou au point qu'il fallait plutôt jouer à l'apaisement, jouer à la sérénité pour que le calme revienne dans la cité.» Le grand mot est lâché ! le gouvernement Souaré a préféré l'apaisement plutôt que de rendre justice. Rien d'étonnant à cela, lorsqu'on sait que les résultats de la commission pourraient déboucher sur des sanctions de hauts responsables du pays, notamment le Président de la république, le général Lansana Conté et son fils Ousmane. A quand donc la fin de l'impunité dans le pays ? C'est toute la question.


1. Saïdou Nour Bokoum, « Interview de Saïdou Nour Bokoum avec "L'Observateur Guinée" », consultée en ligne sur www.manifeste-guinee2010.com, 16 décembre 2008.